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Réponses aux questions de "Fiertés Démocrates"


France

Nathalie Griesbeck a répondu aux questions de l’association Centr’égaux, dans une interview publiée sur  le blog « Fiertés Démocrates » , relative aux questions de genre, d’identité  et d’orientation sexuelle. Retrouvez l’interview ci-dessous. 

Le blog « Fiertés Démocrates » est le blog de l’association Centr’égaux qui a pour but de fédèrer des femmes et des hommes, de sensibilité politique centriste, humaniste et démocrate, désireux de promouvoir l’acceptation de l’homosexualité au sein de leur famille politique. Par le dialogue et la pédagogie, Centr’égaux aide les hommes et femmes politiques centristes et démocrates à être les acteurs éclairés des évolutions sociétales en cours au sein de l’Union européenne et à se positionner en faveur de l’égalité des droits et devoirs entre homosexuel-le-s, transsexuel-le-s et hétérosexuel-le-s.  Nous considérons en effet que les questions de genre, d’identité et d’orientation sexuelles ne doivent pas rester l’apanage de certains partis de gauche. Nous aussi, démocrates, avons notre mot à dire sur ces questions, qui sont avant tout des questions humaines.

Madame Griesbeck, merci de nous accorder cette interview.

Vous êtes députée européenne depuis 2004, élue dans la circonscription Grand Est, et vous participez activement à la Commission LIBE au sein du Parlement Européen. Discute-t-on des droits des homosexuels, bisexuels et transsexuels au sein de cette commission ? Sur quels axes de réflexion ?

Les droits des homosexuels, bisexuels et transsexuels sont assez souvent discutés au sein de la Commission LIBE car nous considérons que la question du respect des droits de l’homme, et j’entends par là les droits de tout individu, quelque soit sa religion, son âge, son genre, son orientation sexuelle, son origine, ou son opinion politique est une question fondamentale dans la construction d’une Europe des droits et des libertés. Nous soulevons également régulièrement des questions relatives aux droits des personnes LGBT ; par exemple très récemment le 13 octobre 2011, nous avons posé une question, au nom de mon groupe parlementaire de l’Alliance des Démocrates et Libéraux pour l’Europe (ADLE) sur le nouveau code civil roumain qui présente des implications sur la libre circulation des personnes LGBT. Par ailleurs, le Parlement s’est non seulement doté d’un intergroupe discutant spécifiquement sur les droits des LGBT mais il a aussi adopté une série de résolutions condamnant fermement toute discrimination envers les personnes LGBT.

– Aujourd’hui la procréation pour les couples homosexuels existe de façon détournée dans la mesure où la loi ne la permet pas. Que ce soit la procréation médicalement assistée pour les couples de même sexe (PMA) ou la gestation pour autrui (GPA), ces interdictions méritent-elles encore d’exister ? Quels sont les barrières juridiques ?

 L’interdiction de la gestation pour autrui ou de la procréation médicalement assistée pour les couples de même sexe en France se vide de son sens, dès lors que les couples sont en mesure d’y avoir recours dans d’autres pays. Cela rend la France particulièrement dépassée sur ces questions. De plus, il faut toujours garder à l’esprit que les vraies réponses sont celles qui facilitent et  respectent la vie des enfants. Pourtant, ces interdictions juridiques créent des situations inextricables pour les parents mais aussi pour les enfants. A titre d’exemple, récemment un père de famille français ayant eu recours à une mère porteuse en Ukraine pour porter ses jumeaux, a été emprisonné par les autorités ukrainiennes en tentant de quitter le pays illégalement, les enfants étant dépourvus de papiers d’identité. On se retrouve dans des situations où des enfants sont envoyés dans des foyers d’accueil à l’étranger car leur naissance n’est pas reconnue juridiquement par la France.

Seriez-vous favorable à une ouverture de la gestation pour autrui dans un cadre juridique précis et non mercantile afin de mettre le droit en cohérence avec une pratique de plus en plus répandue ?

Le problème auquel on doit faire face est justement cette situation de mercantilisme que crée l’interdiction de la GPA et de l’APM dans certains pays et son autorisation dans d’autres. L’APM est désormais ouverte aux couples de même sexe dans un certain nombre de pays européens (Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni, Espagne, Danemark, etc.), un cadre juridique clair et précis serait donc particulièrement judicieux en France certes, mais également au niveau européen. Concernant la gestation pour autrui, la question semble plus problématique encore car les interdictions sont davantage généralisées en Europe. Il n’empêche qu’à l’heure actuelle ces interdictions « spécialisent » des pays comme l’Ukraine dans la gestation pour autrui, attention alors à ce qu’une légalisation uniquement en France ne la spécialise pas également en pays où l’on se rend pour avoir recours à la gestation pour autrui.   

François Bayrou s’est exprimé à plusieurs reprises en faveur de l’adoption pour les couples de même sexe. Est-ce un objectif atteignable rapidement ?

Je crois, et une idée que nous défendons au sein du Mouvement Démocrate qu’il est essentiel que la France s’adapte aux évolutions de la société mais aussi aux évolutions de la jurisprudence des instances juridiques françaises et européennes. Dans son arrêt du 22 janvier 2008, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France pour discrimination à la suite d’un refus d’agrément opposé à une homosexuelle qui souhaitait adopter un enfant. Cet arrêt s’impose aux 47 membres du Conseil de l’Europe, dont la France, et va obliger l’administration française à modifier ses pratiques. Mais il reste au politique un pas à franchir. Ce débat risque certainement d’émerger à nouveau durant la campagne électorale en vue des élections présidentielles de 2012, et selon l’issue de ces élections, cet objectif pourrait être atteignable plus ou moins rapidement.

Plusieurs sondages montrent que la société est prête pour le mariage des couples de même sexe. Etes-vous, à titre personnel, favorable au mariage pour les couples homosexuels ?

Le mariage est pour moi l’héritage du mariage religieux, une union d’un homme et d’une femme. Toutefois le mariage a également une grande valeur symbolique pour chaque couple ayant un projet commun et souhaitant prendre un engagement, quel que soit leur orientation sexuelle, et ceci doit absolument être pris en compte. Chaque couple devrait donc avoir le droit de s’unir dans les mêmes conditions de solennité, devant le maire. Si c’est une question de vocabulaire, la notion de « mariage » posant problème, pourquoi s’évertuer à vouloir légaliser le « mariage » pour tous, pourquoi ne pas s’orienter plutôt vers une union reconnue devant le maire, accessible pour tous de manière égale devant la loi. 

QUESTIONS D’ACTU : On vous sait engagée contre l’homophobie dans le sport depuis votre présence au Tournoi International de Paris en juin dernier. David Douillet avait écrit dans une autobiographie « On dit que je suis misogyne. Mais tous les hommes le sont. Sauf les tapettes ». Quelle est votre position sur sa nomination au ministère des Sports ?

Dans mon travail quotidien, je suis très attachée à une non-discrimination vigilante et respectueuse des personnes et la lutte contre les propos discriminants, qu’ils soient sexistes ou homophobes et la lutte contre l’homophobie font bien sûr partie de mon engagement quotidien.  Les propos de David Douillet tenus lorsqu’il avait 20 ans, sont intolérables, même s’il a, depuis, tenté d’apaiser la polémique en les qualifiant de « propos de vestiaire ». En revanche, si ces même propos étaient tenus par l’un des membres du gouvernement français en exercice, cela irait au-delà de l’intolérable et on se devrait alors d’exiger une démission pure et simple. 

– Que vous évoquent les propos de certains élus de la Nation (Jean-François Coppé, Christian Vanneste, Jacques Myard, Lionnel Luca, Christine Boutin, Jean-Marc Nesme…) entendus à l’occasion de la polémique lancée par eux sur la présence de la notion de genre dans les manuels scolaires ?

Cette polémique répond manifestement de manœuvres politiciennes, Lionel Lucca étant même allé jusqu’à dire que la théorie du genre « servait surtout d’alibi à justifier la pédophilie »! Une polémique du même type avait été lancée sur le film d’animation « Le baiser de la lune », dont la diffusion a finalement été interdite par le Ministre de l’éducation nationale, car il narrait l’histoire d’amour entre Félix le poisson-chat et Léon le poisson-lune. Au delà, ces interdictions et polémiques creuses ne résolvent rien et je suis persuadée que l’éducation doit s’adapter à l’évolution de la société et qu’il est important de lutter contre les discriminations quelles qu’elles soient à l’école et dès le plus jeune âge. Enfin et surtout, les politiques n’ont pas à intervenir et interférer sur les programmes scolaires de cette façon.

Le blog de Centr’Egaux au lien suivant : http://blogs.tetu.com/fiertes_democrates/

6 décembre 2011