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La Directive carte bleue : l’arlésienne oubliée de la Commission ?


LIBE / Mon action

La tribune de Nathalie Griesbeck sur la révision de la Directive « carte bleue » dans la revue d’information juridique européenne des Barreaux français « L’Observateur de Bruxelles » parue ce mois-ci.

 

Comment faire de l’Union européenne une « terre attractive » pour les travailleurs ? Comment agir pour que des personnes qualifiées, diplômées, originaires de pays tiers, viennent travailler en Europe ? Comment rendre cette Europe plus dynamique et plus compétitive ? En réponse à ces questions, l’Union européenne a imaginé, dès 2005, une « carte bleue » – version européenne de la « green card » américaine – pour attirer les travailleurs « hautement qualifiés » du monde entier dans nos Etats européens et pour renforcer le rayonnement de l’Union européenne en termes de recherche, d’innovation et de compétitivité.
Pâle copie de son homologue américaine toutefois, la « carte bleue » européenne n’aura attiré, en quelques années, qu’une poignée de travailleurs, confrontée à des problèmes de rigidité, de  complexité et de concurrence. De nombreuses voix s’élèvent donc, depuis plusieurs années, notamment au sein du Parlement européen et au sein de mon groupe parlementaire, pour une vraie réforme de la Directive « carte bleue » et plus largement pour que l’Union européenne se dote enfin d’une politique commune solide en matière de migration légale. Sans être la panacée, cet « outil » réformé est indéniablement l’un des éléments clefs de cette future politique migratoire, dont doit se doter urgemment l’Union européenne. La révision de la Directive « carte bleue » est aujourd’hui en cours, elle devrait être présentée et adoptée par le Collège des Commissaires le 1er juin prochain. Je demande à la Commission européenne d’éviter une « réforme en demi-teinte », mais au contraire de proposer une réforme significative et ambitieuse.

 

I. LA DIRECTIVE « CARTE BLEUE » OU COMMENT ATTIRER DES TRAVAILLEURS QUALIFIÉS SUR NOTRE TERRITOIRE EUROPÉEN

L’immigration légale, l’immigration pour raisons économiques est un défi majeur, auquel l’Union européenne doit répondre dans le contexte d’une mondialisation de plus en plus grande et d’une concurrence de plus en plus accrue. Toutefois, dans cette économie globalisée, l’Union européenne n’est pas considérée comme attractive par les travailleurs hautement qualifiés. Selon les chiffres officiels d’Eurostat en 2009, seuls 5,5 % de ces travailleurs hautement qualifiés viennent travailler en Europe, alors que près de 54 % choisissent les États-Unis ou le Canada. L’une des causes de cette faible attirance, souvent évoquée, est l’existence d’autant de régimes d’admission que d’Etats membres, entravant considérablement la mobilité des travailleurs migrants potentiels issus de pays tiers. Une disparité qui crée une concurrence entre les États européens eux-mêmes.
Reconnaissant ces lacunes structurelles ainsi que la nécessité d’un cadre européen commun en matière de migrations économiques – bien que la fixation du nombre de « migrants économiques » admis dans l’UE à des fins d’emploi reste une compétence nationale – et prenant dûment en compte la situation conjoncturelle et le déclin – annoncé – de la population en âge de travailler en Europe, la Commission européenne est venue présenter, fin 2005, un Programme d’action relatif à l’immigration légale.

Elle y propose une série d’initiatives législatives et opérationnelles parmi lesquelles 5 propositions législatives à venir : une Directive-cadre sur le statut des ressortissants de pays tiers ayant un emploi en Europe et quatre Direc-tives sur les conditions d’entrée et de séjour, au sein de l’Union européenne, de quatre catégories particulières de personnes : les travailleurs saisonniers, les personnes transférées au sein de leur entreprise, les stagiaires rémunérés et les travailleurs hautement qualifiés.
Proposée en octobre 2007, adoptée définitivement en 2009, la Directive relative à la carte bleue européenne(1) établit donc les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié. Elle créé, en fait, une « carte bleue européenne » : un titre de séjour et un permis de travail, conférant à la personne qui en bénéficie, un ensemble de droits sociaux et économiques.

Ainsi, quelques années de négociations interinstitutionnelles plus tard et pour atteindre l’objectif annoncé dans la Stratégie de Lisbonne en 2001, de devenir « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale », l’Union européenne s’était dotée d’un instrument – la carte bleue européenne – pour attirer, sur son territoire, des travailleurs hautement qualifiés, originaires de pays tiers. Pour la Commission européenne, attirer de tels travailleurs participera pleinement à atteindre trois objectifs européens : renforcer la croissance économique et la compétitivité européennes, remédier aux pénuries sur le marché du travail et compenser les coûts du vieillissement de la population.
En préalable, de qui parle-t-on ? Médecins, ingénieurs, scientifiques, informaticiens, mathématiciens, architectes, etc. L’emploi hautement qualifié y est défini comme un emploi exercé par une personne salariée, rémunérée et qui possède les compétences requises, appropriées et spécifiques, attestées par des qualifications professionnelles élevées. Plus spécifiquement, sont visés les postes pour lesquels un diplôme de l’enseignement supérieur (pour lesquels les études nécessaires ont une durée de minimum 3 ans) est requis ou, dans certains cas, une expérience professionnelle d’au moins 5 ans dans un secteur pertinent.
Pour obtenir cette carte bleue européenne, la personne candidate doit, premièrement, être ressortissante d’un Etat tiers n’appartenant pas à l’Union  européenne. Elle doit, ensuite, présenter les éléments suivants : un contrat de travail ou une offre d’emploi ferme, pour un emploi hautement qualifié, pour une durée d’au moins 1 an et avec un salaire au moins égal à 1,5 fois le salaire annuel brut moyen dans l’Etat concerné ; un document attestant qu’elle possède les qualifications professionnelles élevées pertinentes (et qu’elle satisfait aux conditions pour accéder à la profession s’il s’agit d’une profession règlementée) ; un document de voyage en cours de validité et si nécessaire une demande de visa ; la preuve de souscription à une assurance maladie. Si le candidat remplit ces conditions et que la demande de carte bleue (les Etats sont libres de choisir si elle doit être présentée par le candidat ou le futur employeur) a fait l’objet d’une décision positive des autorités nationales, alors ce candidat se voit délivrer une carte bleue européenne.
Via cette carte bleue européenne – dont la durée de validité peut varier d’une durée allant d’1 an à 4 ans – le ressortissant de pays tiers se voit conférer un certain nombre de droits. Premièrement, le titulaire d’une carte bleue européenne a le droit d’entrer, séjourner et sortir du territoire de l’Etat membre concerné et de l’Union Européenne en vertu du principe de libre circulation. Deuxièmement, il dispose d’un accès au marché du travail – bien que limité, dans un premier temps, puisque tout changement d’employeur est subordonné à une autorisation préalable des autorités compétentes de l’Etat membre concerné. Au bout de 2 ans, il bénéficiera d’une égalité de traitement avec les ressortissants nationaux, notamment en ce qui concerne l’accès aux emplois hautement qualifiés, les conditions de travail, la sécurité sociale, les pensions, la reconnaissance des diplômes, certificats et autres qualifications professionnelles, l’éducation et la formation professionnelle, l’accès aux biens et aux services, etc. Après dix-huit mois de séjour légal, il pourra se rendre dans un autre État membre pour accéder à un emploi hautement qualifié (sous réserve des limites fixées par les autorités de cet État). Troisièmement, le conjoint et les descendants directs du travailleur hautement qualifié bénéficient de la procédure dite de « famille accompagnante ».

La Directive contient enfin des dispositions relatives au refus de délivrance d’une carte bleue et aux motifs de refus – documents falsifiés, volumes d’admission, situation du marché du travail, etc. – de même que des dispositions sur les cas dans lesquels la carte bleue pourra être retirée – ressources insuffisantes, chômage, raisons d’ordre public, etc.
Ainsi, via des conditions « avantageuses » et « de qualité » – conditions de travail, salaire, droits socio- économiques, perspective pour le séjour permanent, réunification familiale –, la carte bleue devait permettre à l’Union européenne de devenir l’une des destinations favorites des diplômés de l’éducation supérieure – comme le sont déjà les États-Unis, l’Australie ou le Canada.

Si j’ai voté, le 20 novembre 2008, en session plénière du Parlement européen – le Parlement n’était, en ce temps, que consulté – en faveur de cette Directive européenne « carte bleue », car elle marque un premier pas indéniable vers une politique européenne commune en matière de migration légale ; j’avais alors exprimé – comme mon groupe parlementaire – de nombreuses réserves. Cette nouvelle Directive contient des restrictions trop importantes et des critères trop stricts qui risquent davantage d’alourdir les procédures et la « bureaucratie » plutôt que d’ouvrir réellement les portes européennes aux travailleurs hautement qualifiés, dont nous avons besoin. La proposition initiale de la Commission européenne était déjà plutôt modeste mais elle a encore été diluée au fil des négociations – empêtrée, à l’époque, dans un débat beaucoup trop émotionnel sur l’immigration.

 

II. LA DIRECTIVE « CARTE BLEUE » OU UN BILAN – QUATRE ANS APRÈS – EXTRÊMEMENT DÉCEVANT

Les Etats de l’Union européenne avaient jusqu’au 19 juin 2011 – 2 ans – pour transposer cette Directive dans leur législation nationale.
Dès 2013, la Commission européenne a commencé à recueillir des informations, des statistiques – dans les États membres – sur l’application de cette Directive européenne : quant au nombre de ressortissants de pays tiers dont la carte bleue européenne a été délivrée, retirée ou refusée, sur la nationalité de ces ressortissants, sur leur profession, sur les membres de leur famille, etc. Et, en mai 2014, elle a publié sa première communication relative à la mise en oeuvre de ce texte législatif – un rapport qu’elle doit présenter tous les trois ans au Parlement européen et au Conseil. Les résultats sont, simplement, extrêmement décevants.

Premièrement, la Commission y dénonce les importantes lacunes en matière de transposition : entre 2011 et 2014, des procédures d’infraction à l’encontre de 20 Etats membres ont été entamées pour défaut de transposition de la Directive ou pour transposition incomplète ou incorrecte. Si ces procédures ont, depuis, été clôturées et si, désormais, tous les Etats membres appliquent la Directive et sont en mesure de délivrer des cartes bleues, cela témoigne – malheureusement et comme souvent – d’un manque de volontarisme probant de la part des Etats membres.

Deuxièmement, la Commission fait état d’une quasi nonutilisation de cette Directive européenne. Depuis l’entrée en vigueur de la Directive, seules 16 000 cartes ont été délivrées dans l’ensemble des Etats membres dont 13 000 par l’Allemagne. Sur la seule année 2012 par exemple, 3 664 cartes bleues ont été octroyées et 1 107 membres de la famille ont été admis. En 2012 toujours, c’est l’Allemagne qui a délivré le plus de cartes bleues (70,52 %), suivie de l’Espagne (12,58 %) et du Luxembourg (4,99 %). À l’autre extrême, la Pologne, le Portugal et la Finlande ont chacun octroyé deux cartes bleues, les Pays-Bas et la Hongrie une seule, la Belgique, Chypre, la Grèce et Malte, aucune ! En 2013, le nombre de cartes bleues délivrées est à la hausse et s’établit à 15 261, celles-ci ayant essentiellement été délivrées en Allemagne (14 197), au Luxembourg (306) et en France (304). Ces chiffres sont stupéfiants d’insignifiance !

Troisièmement, pour attirer des ressortissants tiers hautement qualifiés, de nombreux Etats membres ont conservé ou mis en place des dispositifs nationaux ayant le même objectif que la carte bleue européenne, qui concurrencent donc directement le nouveau dispositif européen. Ces dispositifs nationaux coexistent avec la carte bleue européenne mais, qui plus est, sont beaucoup plus connus et plus utilisés par les entreprises, au détriment de la carte bleue européenne.

Quatrièmement, la Commission note un défaut de communication et une méconnaissance du dispositif carte bleue dans les Etats, en partie dus aux choix politiques opérés par les Etats qui, non seulement, appliquent et promeuvent la carte bleue selon des modalités sensiblement différentes mais aussi, ont fait une communication généralement insuffisante sur ce nouveau dispositif.

Lors de la présentation de ce rapport – en commission Libertés civiles, justice et affaires intérieures du Parlement européen, en juillet 2014 – nous avions été nombreux à fustiger l’immobilisme et l’attentisme incompréhensibles de la Commission européenne qui présentait alors de tels mauvais résultats, sans envisager pour autant ni réforme, ni modifications, ni autres actions ou mesures à prendre. Fort heureusement, les élections européennes de mai 2014 et la nomination de la nouvelle « Commission Juncker » allaient relancer le débat sur cet outil utile au potentiel sous-exploité.

 

III. LA DIRECTIVE « CARTE BLEUE » OU LA NÉCESSITÉ D’UNE RÉFORME SIGNIFICATIVE ET AMBITIEUSE

Dans ses orientations politiques « Un nouvel élan pour l’Europe : Mon programme pour l’Emploi, la Croissance, l’Équité et le Changement démocratique » présentées en juillet 2014, le nouveau Président de la Commission, Jean-Claude Juncker, a annoncé « avoir l’intention de réexaminer la législation sur la carte bleue et sa mise en oeuvre peu satisfaisante ».

Immédiatement, j’ai saisi la Commission européenne(2) pour lui demander si elle avait l’intention de proposer une révision rapide de cette Directive et le cas échéant, dans quel sens et selon quel calendrier. Je demandais également à la Commission comment elle comptait intervenir pour mettre fin aux dispositifs nationaux similaires concurrençant la Directive « carte bleue ».

Dix-huit mois plus tard, si nous savons que la révision de la Directive « carte bleue » constitue, pour la Commission, un élément clef du nouveau Programme européen en matière de migration(3), cette révision n’a toujours pas eu lieu. Elle devrait être présentée et adoptée par le Collège des Commissaires le 1er juin prochain.

A quelques semaines de la publication de cette nouvelle proposition, il est important de rappeler la nécessité et l’urgence de pallier aux imperfections de cette Directive européenne. D’autant plus, si nous souhaitons remédier aux pénuries de qualifications spécifiques – existantes en Europe – et attirer les talents dont l’Union Européenne a besoin. Cette révision de la Directive « carte bleue » ne doit, toutefois, pas être une révision cosmétique, une révision d’ajustements ; non, elle doit, au contraire, être une révision d’ampleur. Nous demandons à la Commission européenne de procéder à un réexamen en profondeur de cet instrument législatif, d’éviter une « réforme en demi-teinte » et de proposer une réforme significative et courageuse.

Nous demandons, premièrement, que la carte bleue européenne soit révisée, afin que les travailleurs, qu’ils soient qualifiés ou non qualifiés – c’est un élément clef – puissent obtenir cette carte, à condition qu’ils remplissent des critères objectifs. Cantonner la carte bleue aux travailleurs hautement qualifiés est une erreur. Il faut mettre en place des quotas d’immigration légale, au niveau de l’Union Européenne, pays par pays, secteur par secteur, sur la base d’accords migratoires conclus par les États membres, sous la coordination de la Commission européenne. La proposition pourrait ainsi, soit élargir le champ d’application de la Directive, soit prévoir une clause d’ouverture, applicable lorsque l’on constaterait un besoin pour certaines catégories de travailleurs autres que les travailleurs hautement qualifiés ou un besoin dans certaines régions.

Le deuxième élément est un élément d’assouplissement. En effet, pour faire face aux fluctuations de la demande de main-d’oeuvre en Europe, le seul remède consiste à prévoir des procédures facilitées et souples. Ainsi, il est nécessaire d’assouplir les nombreux critères qui rigidifient actuellement la Directive – les critères de durée, critères de diplômes et de durée d’études supérieures, critères de rémunération minimale, critères d’années d’expérience – et qui empêchent manifestement la carte bleue de progresser !

Troisième élément à intégrer : pour que ce système de carte bleue puisse fonctionner, il faut créer un portail européen où seraient disponibles les informations concernant les besoins de main d’oeuvre et offres d’emploi sur le territoire européen. Un système centralisé de collecte de données doit être mis en place. Celui-ci devrait indiquer le nombre total de postes à pourvoir dans les États membres, et permettre aux ressortissants de pays tiers de s’inscrire et de postuler depuis leurs pays d’origine. Les entreprises intéressées par leur candidature pourraient ainsi consulter leurs données. Ce portail pourrait être une extension du portail européen sur la mobilité de l’emploi (EURES) qui deviendrait un véritable réseau de coopération conçu pour faciliter la libre circulation des travailleurs au sein des 28 États membres de l’Union, mais également celle des ressortissants de pays tiers.
Un autre élément clef – dans cette révision, même s’il est indirect – est l’intégration de ces personnes, de ces travailleurs, dans nos sociétés européennes. L’intégration réussie des ressortissants de pays tiers en séjour régulier et de leurs descendants est un élément fondamental – voire vital par les temps qui courent – pour la stabilité et la cohésion de nos sociétés. Pour cela, il est essentiel d’élaborer des politiques efficaces et de prévenir l’isolement. Les obstacles à l’intégration doivent être activement éliminés.

En conclusion, la nouvelle « carte bleue » de l’Union européenne doit devenir un équivalent réaliste de la « carte verte » américaine pour attirer l’innovation et les entreprises innovantes en Europe. L’immigration légale joue un rôle important pour renforcer l’économie de la connaissance en Europe et pour booster notre développement économique.
Au-delà, si nous voulons rendre l’Europe au moins aussi attrayante que les États-Unis, le Canada ou encore l’Australie, nous devons mettre en place, d’urgence, une nouvelle politique européenne en matière de migration légale, corollaire indissociable d’une politique européenne en matière d’immigration illégale.
Reste enfin à souligner que le recours à l’immigration aux fins d’un emploi hautement qualifié ne saurait être une solution à long terme aux problèmes économiques ou démographiques européens. À moyen et à long terme, les États membres doivent prendre d’autres mesures dans le domaine des politiques de l’emploi, de l’économie et de la famille, pour répondre aux évolutions actuelles et futures dans l’Union européenne.

 

Nathalie Griesbeck

Le 12 mai 2016

 

 

 

1. Directive européenne 2009/50/CE du Conseil du 25 mai 2009 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié.

2. http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-%2f%2fEP%2f%2fTEXT%2bWQ%2bE-2014-010039%2b0%2bDOC%2bXML%2bV0%2f%2fE N&language=EN
3. http://ec.europa.eu/lietuva/documents/power_pointai/communication_on_the_european_agenda_on_migration_en.pdf

2 juin 2016