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Mineurs isolés : les solutions existent, il faut simplement une volonté politique


LIBE

Membre de la commission Libertés civiles, justice et affaires intérieures et vice-présidente de l’intergroupe Droits de l’Enfant, Nathalie Griesbeck est intervenue en session plénière du Parlement européen lors du débat consacré aux politiques et actions de l’Union visant à protéger les enfants dans le contexte de la migration. Elle a interpellé la Commission et les Etats membres de l’Union européenne et les a exhortés à cesser de détourner le regard et à honorer leurs obligations juridiques et morales envers ces enfants.

 

Intervention de Nathalie Griesbeck

 

Merci Monsieur le Président,
Monsieur le Commissaire,

Notre débat porte sur les enfants dans le contexte de la migration et je souhaite revenir sur la situation des enfants non accompagnés, c’est-à-dire, ceux qui arrivent ou se retrouvent seuls sur notre territoire européen.

En septembre 2013, le Parlement a adopté un rapport sur la situation des mineurs non accompagnés.

Il y a plus de trois ans déjà…

Comme rapporteur, je proposais, je demandais, j’insistais sur la nécessité d’adopter une vraie stratégie, de vraies mesures et des normes communes minimales pour protéger ces enfants comme il se doit !

Depuis, rien n’a été fait ou presque …

À l’époque, nous dénoncions déjà l’urgence de la situation de ces enfants mais nous parlions de 13000 mineurs non accompagnés ;

Aujourd’hui, ils sont 96000 mineurs non accompagnés arrivés en Europe ! Et naturellement, nous n’avons pas plus de stratégie et pas plus de réponse adaptée.

Rendez-vous compte, Monsieur le Commissaire, les images de ces enfants apeurés, qui sont la proie de réseaux, qui sont seuls et ces images participent au risque de désastre collectif qui menace notre Europe !

Trois choses.

Premièrement, Monsieur le Commissaire, il faut une stratégie globale sur les enfants non accompagnés. Dans l’agenda européen pour la migration [adopté en mai 2015], le mot « enfants », le mot même « enfants » apparait une seule fois et indique qu’un suivi au Plan d’action sur les mineurs non accompagnés est en cours. Je vous demande où en est ce suivi.

Deuxième point : la relocalisation. Je lance ici un appel aux Etats membres de l’Union qui sont engagés à relocaliser 160 000 réfugiés depuis l’Italie et la Grèce. Nous savons tous que ce n’est clairement pas la priorité des Etats puisque seules 6000 personnes ont été relocalisées depuis l’an dernier ! Et parmis ces personnes, seuls 75 mineurs non accompagnés ont été relocalisés. C’est une honte ! Je ne comprends même pas comment cela peut-être possible !

Troisième point : Dublin. On ne peut pas passer sous silence la révision malheureuse actuelle du Règlement de Dublin ; non pas la révision elle-même mais les éléments de cette révision. Ce que vous proposez concernant les mineurs non accompagnés c’est exactement l’opposé de la jurisprudence pourtant claire, de la Cour qui interdit de balloter les enfants d’un pays à un autre.

En conclusion : face au courage de ces enfants qui ont traversé une partie de la planète, face à ce courage, nous proposons une sorte d’incapacité d’accueillir ces mineurs comme il se doit.

Les solutions existent. Il s’agit simplement d’avoir une volonté politique à la hauteur des valeurs que porte normalement notre Union.

 

Plenary session week 43 2016 in Strasbourg - EU policies and actions to protect children in the context of migration. Oral question

@Europarl

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La question orale à l’origine de ce débat parlementaire

 

Objet: Politiques et actions de l’Union visant à protéger les enfants dans le contexte de la migration

On dénombre actuellement 65 millions de personnes en déplacement à travers le monde, parmi lesquelles un grand nombre d’enfants, qui fuient un conflit, la pauvreté ou des phénomènes météorologiques extrêmes à la recherche d’une vie meilleure et d’un endroit où elles pourront se sentir chez elles. Ces enfants comptent parmi les personnes les plus vulnérables de la planète et il est peu probable que leur nombre diminue. Nous sommes ici face à l’un des plus grands défis de notre époque. Beaucoup se déplacent avec leur famille; beaucoup d’autres sont seuls. Chacun d’eux a besoin de protection et bénéficie des droits garantis par la convention relative aux droits de l’enfant. Les enfants migrants, en particulier ceux qui n’ont pas de documents, sont exposés à la traite, aux abus et à l’exploitation. En outre, la Commission a annoncé, dans son agenda européen en matière de migration, différentes stratégies et approches qui ne se sont pas concrétisées jusqu’à présent. Davantage d’efforts doivent être consentis, notamment dans les domaines suivants:

  1. Développer des procédures efficaces pour les enfants: les procédures doivent être efficaces et rapides, en particulier pour les enfants (y compris ceux qui sont avec leur famille) qui ne peuvent pas changer d’adresse, de pays ou d’école;
  2. Mettre fin à la détention arbitraire d’enfants: les procédures doivent être plus rapides et il convient d’accélérer les procédures d’accueil appropriées;
  3. Favoriser les procédures de regroupement familial;
  4. Tutelle: des retards ont été signalés en ce qui concerne la désignation de tuteurs ainsi que leur capacité à agir efficacement;
  5. Garantir l’accès à l’éducation: les enfants migrants ont exactement les mêmes droits d’accès à l’éducation que les autres enfants;
  6. Optimiser les processus de relocalisation: à la fin septembre, seuls 46 enfants non accompagnés avaient été relocalisés;
  7. Apporter une aide psychologique aux victimes de traumatismes.

La Commission compte-t-elle, afin d’honorer ses engagements, adopter un cadre politique clairement défini et mesurable en vue de mettre en œuvre une approche globale visant à prévenir la violence, l’exploitation et les abus, à renforcer les systèmes de protection des plus vulnérables (y compris, notamment, les mineurs non accompagnés) et à surveiller les cas de discrimination en ce qui concerne l’accès à l’éducation, aux soins de santé et à la protection pour les enfants tout au long de la chaîne migratoire?

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Interview Europarl TV

 

Nathalie Griesbeck était également l’invitée d’Europarl TV sur cette question. Le reportage ici :

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Voici le communiqué de presse du groupe parlementaire de Nathalie Griesbeck :

 

Migration: Il faut d’urgence une législation européenne visant à renforcer la protection des enfants

L’alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe au Parlement européen (ADLE) a appelé aujourd’hui la Commission européenne à présenter un cadre de la politique européenne afin de renforcer les systèmes de protection pour les enfants réfugiés et migrants, en particulier pour les mineurs non accompagnés.

Cecilia Wikström, coordinatrice pour l’ADLE au sein de la commission LIBE, a déclaré :
« Les conditions de vie des enfants, en particulier les mineurs non accompagnés, qui ont vécu dans la ‘Jungle’ à Calais, sont une honte pour l’UE. En tant que rapporteur pour la révision du règlement de Dublin, je suis à la recherche de solutions possibles garantissant la sécurité et la sécurité des enfants en tant que demandeurs d’asile en Europe ».
« Europol a déclaré que jusqu’à 10 000 enfants réfugiés ont disparu au cours de leur séjour en Europe. Nous devons rechercher toutes les possibilités pour empêcher qu’ils soient exploités par des personnes sans scrupules et pour veiller à ce que tous les enfants de notre continent reçoivent les soins et la sécurité adéquats ».

Nathalie Griesbeck, membre de l’ADLE au sein de la commission LIBE et vice-présidente de l’Intergroupe du Parlement européen sur les droits des enfants, a ajouté : « Il y a trois ans déjà, ce Parlement a adopté un rapport appelant à une stratégie complète, de véritables mesures et des normes minimales pour protéger les enfants non accompagnés. Cependant, rien n’a été fait ».
« Trois mesures sont nécessaires d’urgence. Premièrement, nous demandons à la Commission de proposer d’urgence une stratégie pour les mineurs non accompagnés. Deuxièmement, nous demandons aux États membres de mettre en oeuvre leurs obligations de relocalisation, en particulier concernant les enfants. Il est honteux de voir que jusqu’à présent, seulement 75 mineurs ont été relocalisés depuis la Grèce et l’Italie. Troisièmement, nous demandons un véritable changement dans la réforme du système de Dublin : le transfert de mineurs devrait être complètement interdit comme il l’est fermement stipulé dans la jurisprudence de la CJE ».

« Cette situation est paradoxale. D’une part, nous assistons au courage de ces enfants qui ont traversé le monde, d’autre part, nous montrons notre incapacité à les accueillir comme il se doit ».

26 octobre 2016