La fin de vie à l’aune de la Loi Leonetti dix ans après
Jeudi 26 novembre, Nathalie Griesbeck a répondu présente à l’invitation du Dr François Gallon, spécialiste en gynécologie-obstétrique, pour une conférence à l’Hôpital-Clinique Claude Bernard de Metz sur les réflexions éthiques liées à la loi Léonetti sur la fin de vie en France et les éventuels impacts de l’application de cette loi, dix ans après sa promulgation.


Face au panel de praticiens et spécialistes mais aussi de représentants de différents cultes présents en Moselle, Nathalie Griesbeck a présenté les différentes législations existantes dans les pays européens ainsi que la déclaration écrite du Parlement européen sur la fin de vie dont elle est cosignataire.
Le Parlement européen et la fin de vie
Le 5 octobre 2015, 14 députés de plusieurs groupes parlementaires ont signé une déclaration écrite sur la dignité en fin de vie. Cette déclaration rappelle notamment le droit à mourir dans la dignité, ce qui suppose une assistance médicale adaptée.
Le 24 novembre 2015, 75 députés, dont Nathalie Griesbeck, avaient signé cette déclaration écrite.
La fin de vie dans des conditions dignes relève de la compétence de l’Union européenne (« L’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme », article 2 du TUE).
Les députés cosignataires souhaitent ainsi que la Commission européenne fasse une analyse des différentes formes de service de santé apportés en fin de vie. Le but à terme serait de mettre en évidence les meilleures pratiques pour que les États s’inspirent de ce que font leurs voisins.
Voici le texte de la déclaration écrite :
Déclaration écrite, au titre de l’article 136 du règlement du Parlement européen, sur la dignité en fin de vie, du 5 octobre 2015.
- La dignité, en tant que valeur universelle et indivisible sur laquelle l’Union européenne est fondée, doit être garantie à toutes les étapes de la vie.
- Le droit à vivre dans la dignité présuppose le droit à mourir dans la dignité.
- Tous les citoyens européens, quelle que soit leur nationalité, qui se trouvent à une phase avancée ou en phase terminale d’une maladie incurable occasionnant des souffrances physiques ou mentales insupportables qui ne peuvent pas être atténuées, devraient pouvoir bénéficier d’une assistance médicale en vue de mettre un terme à leur vie dans la dignité.
- L’article 35 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et les articles 6, point a), 9 et 168 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) confèrent à l’Union des compétences pour coordonner ou compléter les actions des États membres dans le domaine de la protection et de l’amélioration de la santé publique.
- La Commission est invitée à procéder à une analyse des différentes formes de services de santé tels qu’ils sont apportés en fin de vie dans les États membres afin d’identifier les meilleures pratiques.
- La Commission est invitée à faciliter l’échange, entre les États membres, des bonnes pratiques en matière de services de santé en fin de vie afin de garantir la dignité humaine de tous les citoyens en fin de vie.
- La présente déclaration, accompagnée du nom des signataires, est transmise au Conseil et à la Commission.
Les législations sur la fin de vie dans d’autres pays européens
- Le recours encadré à l’aide à mourir est autorisé en Belgique et aux Pays-Bas depuis 2002 ainsi qu’au Luxembourg depuis 2009.
- En Belgique, le patient doit formuler sa demande de façon « volontaire, réfléchie et répétée » et se trouver dans une situation de souffrance « constante, insupportable et inapaisable ». Le patient doit faire cette demande dans un état conscient ou faire une déclaration valable 5 ans.
- Le dispositif aux Pays-Bas suppose deux avis médicaux et n’est valable que lorsque le patient en fait la demande en pleine possession de ses moyens.
- Au Luxembourg, l’aide à mourir est autorisée pour les situations médicales « sans issue ».
- L’abstention thérapeutique (interruption du dispositif médical) est autorisée ou tolérée avec des dispositions variables dans les pays suivants : en Allemagne, en Autriche, au Danemark, en Espagne, en France, en Italie (droit de refuser des soins), au Portugal (« cas désespérés »), au Royaume-Uni et en Suède ainsi qu’en Suisse et en Norvège.
- La loi Leonetti, en France, instaure un droit au « laisser-mourir », qui est accompagnée par le dispositif des soins palliatifs. Certains médicaments peuvent être administrés, même s’ils ont pour effet « d’abréger la vie ».
- Au Danemark, le patient peut faire explicitement une demande qui refuse l’acharnement thérapeutique. Ces demandes sont conservées dans un fichier central.
- En Espagne, en Hongrie et en République tchèque, les malades incurables ont le droit de refuser leur traitement.
- L’aide à mourir, quelle que soit sa forme, est formellement interdite en Irlande, en Pologne, en Roumanie et en Grèce. Elle est passible de peines maximum allant de 5 ans (Pologne) jusqu’à 14 ans de prison (Irlande). En Pologne, le tribunal peut renoncer à infliger la peine dans des « cas exceptionnels ».
- Le « suicide assisté » (le médecin montre au patient encore lucide et mobile une méthode lui permettant de mettre fin à ses jours le plus sereinement possible), est autorisé en Suisse. Il a été dépénalisé en Espagne lorsque le malade a fait des demandes répétées et qu’il souffre d’une maladie incurable ou d’une affection causant des douleurs permanentes et difficiles à supporter.
Vous pouvez retrouver un tour d’horizon des législations européennes sur la fin de vie dans une intéressante infographie interactive réalisée par la chaîne ARTE au lien suivant : http://info.arte.tv/fr/les-europeens-divises-face-la-fin-de-vie