Cela fait plusieurs années que le Parlement européen dénonce la situation en matière de respect de l’Etat de Droit et des libertés fondamentales en Hongrie (cf. articles précédents à ce sujet). Face à la détérioration grave concernant la situation des droits fondamentaux – en témoigne la nouvelle loi autorisant la police hongroise à chercher les migrants dans des logements privés et à utiliser la force contre eux, sans mandat – et à l’initiative du groupe parlementaire de Nathalie Griesbeck, lundi soir, était mise aux voix, l’activation de l’Article 7. 1 du Traité sur l’Union Européenne. Cet article 7.1 permet au Parlement européen de demander à la Commission de constater l’existence d’un risque clair de violation grave par un Etat membre des valeurs fondamentales européennes, un vote très symbolique pour la défense des droits de l’Homme et des valeurs européennes. Pourtant, lors d’un vote honteux, la droite et même (!) la gauche – le groupe socialiste – ont voté, main dans la main, contre l’activation de cet article 7.1. Explications dans cet article.
Le Conseil vérifie régulièrement si les motifs qui ont conduit à une telle constatation restent valables.
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L’état des droits fondamentaux se détériorant gravement en Hongrie, récemment révélé par la législation hongroise qui accorde à la police le droit de rechercher des migrants dans les logements privés, sans mandat, et qui permet à l’armée d’utiliser la force contre les réfugiés, l’ADLE a décidé de maintenir sa demande d’engager la procédure de l’article 7.1 dans le cadre de la commission des libertés civiles du Parlement européen, malgré l’opposition du groupe des S&D.
« La manière dont la Hongrie traite les réfugiés réveille les vieux démons du passé. Traquer les réfugiés et permettre à la police de tirer sur eux vont à l’encontre des valeurs de l’Europe. Il est grand temps que ces pratiques soient examinées par la Commission. Il est de notre responsabilité politique et morale de faire en sorte que nos valeurs communes soient respectées à tout moment », a déclaré Guy Verhofstadt, président de l’ADLE.
Cecilia Wikström, coordinatrice de la commission des libertés civiles espère que toutes les forces pro-européennes du Parlement européen uniront leurs forces pour défendre les valeurs et les principes de l’UE: « Je me félicite que les démocrates et les libéraux continuent à se battre pour convaincre nos collègues des autres groupes du Parlement européen à entamer la procédure au titre de l’article 7 à l’encontre de la Hongrie. Toutefois, je suis profondément consternée que les S&D aient soutenu lundi le PPE en protégeant le gouvernement hongrois de M. Orbán, plutôt que de défendre le peuple hongrois et défendre les valeurs fondamentales sur lesquelles l’Europe est fondée. L’Europe ne doit plus rester passive alors que le gouvernement hongrois enfreint systématiquement et gravement les droits de l’homme et les valeurs fondamentales de l’UE. La Hongrie doit, en tant que l’un des 28 Etats membres de l’UE, respecter les règles et les accords de l’UE et ses engagements internationaux. »
L’ADLE rappelle que certains des derniers développements survenus en Hongrie soulèvent de graves inquiétudes de nature juridique et regrette que des pressions politiques aient prévalu sur les principes et les valeurs de l’UE. L’accord entre les deux groupes principaux du Parlement mène tout simplement à davantage d’impunité pour ceux qui enfreignent ces valeurs et sape l’ensemble du projet européen. Il faut activer l’article 7, a déclaré l’ADLE, afin de vérifier si les mesures législatives suivantes, adoptées par le Parlement hongrois, sont conformes aux valeurs et principes de l’UE :
Sophie in’ t Veld, première vice-présidente de l’ADLE, a ajouté: « Il ne s’agit pas de pointer du doigt un seul pays, c’est plus que cela. Nous ne tolérons pas que Volkswagen se rende coupable de fraudes en ce qui concerne les règles environnementales européennes, et nous ne tolérons pas également que les droits de l’homme et l’Etat de droit ne soient pas respectés « .
« Le traité nous donne une procédure afin de remettre un pays à nouveau sur la bonne voie, il n’y a pas d’autre façon de procéder. A l’initiative des démocrates et des libéraux, le parlement européen est en train d’élaborer un système annuel visant à contrôler le respect des droits fondamentaux, l’Europe doit se doter de davantage d’instruments destinés à guider les pays dans la bonne direction. Activer l’article 7 se justifie par les violations systématiques des droits fondamentaux. Il ne s’agit pas seulement des dernières mesures contre les migrants mais aussi contre la liberté des media, contre les Roms, contre la liberté de l’éducation et bien davantage. »
Louis Michel, membre de la Commission des libertés civiles, a ajouté:
« Je suis stupéfait qu’un groupe comme le S&D, qui, comme nous, a systématiquement dénoncé la situation en Hongrie, refuse aujourd’hui de rédiger un rapport officiel sur cette question urgente. La criminalisation des réfugiés, la chasse aux migrants, l’autorisation pour l’armée de tirer sur des personnes en détresse sont les violations de trop. M. Orban doit être tenu responsable pour l’ensemble de ses actions que le Parlement européen n’a eu de cesse de dénoncer ces dernières années. Refuser de lancer la première étape de l’article 7, limiterait le Parlement européen à une assemblée qui s’insurge, qui condamne, mais qui n’agit pas. »
Notes aux rédactions:
L’ADLE déplore le résultat de la réunion des coordonnateurs de la commission des libertés civiles qui s’est déroulée hier à Strasbourg, où le PPE et les S & D rejeté la demande de l’ADLE d’activer l’article 7 du traité contre la Hongrie. Les S & D et le PPE ont bloqué la possibilité d’examiner si l’état de la démocratie, de l’Etat de droit et des droits fondamentaux en Hongrie, notamment les dernières mesures adoptées par le parlement hongrois dans le domaine du droit d’asile et de la migration, et la situation préoccupante de la liberté de la presse et des droits de l’homme en Hongrie, pouvaient entraîner « un risque clair de violation grave par un État membre des valeurs » de l’UE.
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Articles précédents à ce sujet :
https://www.nathalie-griesbeck.fr/2014/10/hongrie-il-y-va-de-la-credibilite-de-lunion/
https://www.nathalie-griesbeck.fr/2013/04/hongrie-notre-role-de-sentinelle-vigilante/
https://www.nathalie-griesbeck.fr/2012/01/hongrie-nous-reclamons-des-sanctions/
13 octobre 2015