Lanceurs d’alerte : le Parlement européen presse la Commission d’agir
Le 24 octobre 2017, une large majorité des députés européens a adopté une résolution qui insiste sur le besoin de protéger les lanceurs d’alerte à l’échelle européenne. Ce texte demande instamment à la Commission, jusqu’ici réticente, d’agir en faveur d’une protection des lanceurs d’alerte. Explications de Nathalie Griesbeck en vidéo.
Le 16 octobre dernier, Daphne Caruana Galizia, journaliste maltaise, est assassinée alors même qu’elle enquêtait sur la corruption dans son pays. Ce récent scandale confirme la nécessité de prendre des mesures concrètes pour protéger les lanceurs d’alerte.
Huit jours après, le Parlement européen a adopté une résolution qui appelle la Commission européenne à faire une proposition législative pour mieux protéger les lanceurs d’alerte.
Comme le souligne Nathalie Griesbeck, le sujet est sensible. Les lanceurs d’alerte permettent de dénoncer des pratiques illégales et immorales. Il convient néanmoins de s’assurer de la véracité des accusations, afin d’éviter toute dénonciation infondée.
Les lanceurs d’alerte, quelle définition ?
Le lanceur d’alerte désigne une personne ou un groupe qui estime avoir découvert des éléments qu’il considère comme menaçants pour l’homme, la société, l’économie ou l’environnement et qui, de manière désintéressée, décide de les porter à la connaissance d’instances officielles, d’associations ou de médias, parfois contre l’avis de sa hiérarchie.
En 2014, le Conseil de l’Europe a défini le lanceur d’alerte comme : « toute personne qui fait des signalements ou révèle des informations concernant des menaces ou un préjudice pour l’intérêt général dans le contexte de sa relation de travail, qu’elle soit dans le secteur public ou dans le secteur privé ».
L’impact des révélations : l’exemple de la commission PANA
Les lanceurs d’alerte ont déjà eu une influence sur l’agenda politique du Parlement.
Suite aux révélations des scandales LuxLeaks et des Panama Papers, la Parlement européen a constitué en juillet 2016 une commission spéciale d’enquête dont Nathalie Griesbeck est membre.
Cette commission dite « PANA » a organisé pendant plus d’un an différentes réunions avec des représentants de multinationales, des organisations de la société civile, afin d’enquêter sur l’évasion fiscale et le blanchiment d’argent.
Le rapport final a été adopté le 18 octobre dernier au sein de la commission PANA et sera à présent soumis au vote du Parlement européen lors de la session plénière de décembre.
Le Parlement lutte pour une action concrète de la Commission
Jusqu’à présent, la Commission européenne a refusé de proposer une initiative législative sur le sujet.
En 2016, le Parlement européen a réussi à introduire au sein de la directive sur le « secret des affaires » des références aux lanceurs d’alerte malgré les réticences du Conseil et de la Commission.
En février, le Parlement a adopté une résolution appelant la Commission à mettre en place un « programme européen efficace et complet pour protéger les lanceurs d’alerte ». Le texte propose la création d’un organe européen indépendant chargé de recueillir les informations fournies par les lanceurs d’alerte.
Une nouvelle résolution pour « une protection des lanceurs d’alerte à l’échelle européenne »
Le texte adopté ce 24 octobre, par les députés européens, appelle la Commission à agir en faveur d’un cadre européen de protection pour les lanceurs d’alerte. Actuellement, chaque pays dispose de règles spécifiques. Face aux nombreux dysfonctionnements, le rapport tend à uniformiser les règles de protection au niveau européen.
Le Parlement européen :
propose la création d’organes nationaux indépendants qui puissent évaluer la crédibilité et la véracité des signalements. Ces organes seraient coordonnés à l’échelle européenne ;
demande la mise en œuvre de mesures de soutien aux lanceurs d’alerte, soumis à des conditions de vie difficiles suite aux révélations ;
souhaite également que les lanceurs d’alerte puissent être protégés face aux éventuelles représailles ;
et insiste sur la mise en place de mécanismes de signalement qui permettent de faciliter le lancement d’alerte dans un cadre interne.
Les députés européens attendent à présent que la Commission européenne propose un texte avant fin 2017.